Et ce léger sourire au coin des lèvres...

Nous sommes tous les deux assis devant nos verres, un monaco pour moi et un demi pour lui, qu'il a commandé sans même me demander mon avis, histoire de ne pas changer les bonnes habitudes.

Il est 16H, dans moins d'une heure nous devons être dans une salle des fêtes quelconque pour un banquet de fin d'année de jeunes cadres dynamiques, cadres qui seront bientôt trop bourrés pour faire attention à nous et qui passerons la soirée à lorgner dans le décolleté de la secrétaire (blonde bien sur) qui sourit bêtement à l'appareil photo (concluera? concluera pas?).

Mais il ne bouge pas, il n'a pas l'air d'en avoir envie.

Il me regarde, les yeux pétillants, sans dire un mot.

Je soutiens son regard, l'air faussement innocente, un léger sourire en coin. Je joue avec mon verre, attendant qu'il se décide à parler et sachant pertinnemment ce qu'il va me dire.

Il se racle la gorge, cherche visiblement ses mots mais se décide enfin.

"T'as progressé quand même...d'abord C. tu lui as dit quoi pour qu'elle soit de si bonne humeur, enfin heureuse d'être là?"

Je hausse les épaules sans rien dire mais mon sourire s'élargit.

Il attend ma réponse, amusé.

"Ce qu'elle avait envie d'entendre bien sur..."

"Et pour A...Tu lui as retourné le cerveau hein...En même temps t'aurais essayé avec moi tu te serais ramassée..."

"C'est pour ça que j'ai choisi la proie facile dans l'histoire..."

Il éclate de rire pendant que je bois tranquillement mon verre et que j'ajoute, l'air de rien :

"Faut dire que j'ai eu des bons profs...depuis 3 ans..."

Il s'arrête de rire et me sourit...franchement...comme il ne l'avait jamais fait...une vraie connivence, un sourire plein de sous-entendus que je commence enfin à comprendre.

"Au fait...je m'excuse de ne pas te l'avoir dit plus tôt...Mais je crois que tu en as tiré plus de satisfaction à le découvrir par tes propres moyens non?"

J'ai quand même la descence de rougir à ce moment là et de prendre vaguement l'air gênée.

"Mais non voyons qu'est ce qui te fait dire ça ?"

"Ton sourire..."

Et paradoxalement, alors que je ne me suis jamais sentie aussi seule, à ce moment précis, j'étais vraiment bien...mais vraiment...

Tic tac...

Il est minuit, je suis couchée...

Malgré ma fin de soirée un peu houleuse ça va à peu près, je suis un peu triste mais à la réflexion je me dis que ça va, que je verrais bien comment les choses évoluent dans le futur...

Les voisins du dessus font un peu de bruit, mon mal de crâne va augmentant et je ne fais que tourner en rond dans mon lit.

Même pas possible d'écouter tranquillement de la musique pour m'endormir, je suis trop agitée alors que je suis épuisée.

Mon coeur commence à battre tellement vite que j'ai du mal à respirer. Ma tête me fait atrocement mal, la moindre lumière est une torture et je n'ai qu'une envie, me rouler dans un coin de mon lit en attendant que ça passe.

Mais ça ne passe pas...

Et des mots se mettent à clignoter en gros dans ma tête : "tu es toute seule, toute seule toute seule toute seule"...

Inutile de le nier, le fait de les savoir ensemble m'a fait énormément plaisir (question de satisfaction personnelle, d'avoir découvert le secret et de les savoir heureux tout ça), non seulement parce qu'ils font un beau couple mais parce que ça m'a définitivement guérie de mon épisode F.

Mais voilà cette histoire m'a ramenée à ma propre solitude amoureuse("mais pourquoi j'ai pas d'amoureux moi?"), je me suis précipité vers un début de relation ambigüe et très attachante pour être sure de pas être toute seule et je me suis mangé les dents...

Et j'ai eu mal, très mal...mais c'est le corps qui a tout pris vu que j'étais dans un état de fatigue avancé...

Sale soirée hein...

Enfin c'est pas tout ça mais maintenant...avec ou sans filet?